Participant à la 11e conférence de Moscou sur la sécurité internationale dont les travaux ont été ouverts ce mardi 15 août, le ministre de la Défense Sadio CAMARA ne s’est pas retenu pour s’attaquer aux dirigeants de la CEDEAO qu’il considère comme des marionnettes à la solde notamment de la France. Intervenant lors de la 11e conférence de Moscou sur la sécurité, pour la 2e participation consécutive de notre pays, le ministre de la Défense Sadio CAMARA, a regretté l’incapacité collective de la région du Sahel à répondre aux défis sécuritaires se traduisant notamment par un retard économique.
«Il est regrettable de constater qu’encore aujourd’hui, alors que l’Afrique reste totalement inaudible sur les grands problèmes mondiaux, les puissances étrangères continuent de dicter les modes de gestion des problèmes africains.
Leur complexe de supériorité et leur arrogance ne cessent de frustrer nos populations et d’humilier nos gouvernements. L’actualité nous le montre encore avec les crises au Mali, au Burkina Faso et au Niger. Etats centraux du Sahel, liés par la géographie, l’histoire et la sociologie.
Il est donc important de rappeler, devant cette audience éclairée, la nature des menaces et défis liés à la sécurité en Afrique, avant d’expliquer l’échec des initiatives de coopérations militaires expérimentées pour les maitriser.
Cela permettra d’ébaucher la solution malienne des solutions et stratégies appropriées pour corriger notre trajectoire collective.
Quels sont les principaux défis sécuritaires du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest ?
Notre région est confrontée à une violence d’une rare portée dans son histoire qui se manifeste par les agissements de certains acteurs internes et externes que nous classons selon leur motivations en groupes armés terroristes (GAT), groupes criminels transnationaux aux groupes hybrides à tendance sécessionniste.
Ils ont tous en commun leur volonté d’encourager et d’instrumentaliser les crises de coexistence communautaire dont ils se nourrissent.
Pour autant, ces phénomènes néfastes ne sont que des symptômes superficiels dont la racine est bien plus profonde.
Tout d’abord, nous devons reconnaître nos problèmes internes de gouvernance. Les jeunesses africaines se sentent marginalisées par les dirigeants qui ne leur ressemblent pas, qui ne vivent pas comme eux. Qui ne comprennent ni leurs problèmes, ni leurs aspirations.
Les politiques publiques mises en œuvre ne correspondent pas aux besoins des peuples. Et les élus sont en décalages croissant avec ceux qu’ils sont censés représenter.
Le fossé se creuse de jour en jour. Les inégalités s’approfondissent en continu. Ce décalage s’explique par le fonctionnement de nos jeunes Etats africains qui est encore marqué par l’héritage de période d’humiliation et de domination étrangère.
La barbarie des siècles d’esclavage et de colonisation, et la perfidie des postures universaliste de la période néocoloniale actuelle ont laissé des traces.
Sous prétexte de politique libérale d’ajustement structurel, les systèmes éducatifs africains ont été détruits et les systèmes de sécurité ont été désarmés par l’ancien maître désormais transformé en partenaires stratégiques.
Ce même partenaire stratégique qui agit seul et en bandes organisées continue de renforcer sa domination et entretenir la dépendance.
Toujours disposé à donner des leçons d’humanité, il s’appuie sur des leaders qu’il manipule pour ses intérêts souvent liés à l’exploitation des ressources naturelles.
Ils allument des incendies ravageurs qu’il fera ensuite semblant de venir éteindre en proposant des solutions miracles.
L’attaque contre la Libye en 2011 est la parfaites illustration de cette pratique mafieuse ; cette stratégie à préméditer la déstabilisation du Sahel a fait de mon pays, le Malin la 1ere victime, malheureusement sous les regards moqueurs et des condescendant des voisins, inconscients des dangers qui les guettent.
Le feu s’est étendu dans toute la région, et les pyromanes se sont déguisés en pompiers célébrés comme des sauveurs.
Nous vivons encore les conséquences de cette tragédie.
La destruction du tissu social et du vivre ensemble dans notre espace obéit donc à des dynamiques et des influences externes qui exploitent les failles et faiblesses internes à nos sociétés.
Pour autant, l’heure n’est ni victimisation, ni fatalisme.
Il s’agit plutôt de faire un diagnostic éclairé et lucide des raisons de l’échec des stratégies actuelles.
Pour affronter ces défis, les pays africains ont peu de chance de réussir tant qu’ils avancent en rang dispersé.
Leurs stratégies politiques et sécuritaires sont souvent imposées de l’extérieur et observent une ingérence permanente dans toute leur décision.
Cette tendance risque de s’aggraver avec l’importation des grandes puissances dans notre continent dans le cadre d’une nouvelle guerre froide.
Cela concerne non seulement les grands débats d’importance planétaires comme les questions climatiques ou la gestion des pandémies, mais aussi les politiques intérieures.
Ainsi, certains chefs d’Etat sous influence dont les pays ont densité de populations dix fois moins faibles qu’en Europe reprennent à leur compte les solutions biaisées au contre de la démocratie et imposent avec zèle des restrictions de naissance leur propre pour satisfaire l’hystérie anti-migratoire des pays européens.
D’autres Etat jouent avec brutalité le rôle de gendarme et de garde-frontières au profit des mêmes pays européens qui leur donnent des miettes pour empêcher leurs frères de se déplacer, au mépris des droits et des intérêts de leurs propres frères.
Les institutions régionales et sous régionales dont le financement est négligé par leurs propres membres survivent grâce aux fonds extérieurs doivent obéir à ceux qui les paient. Elles sanctionnent leur membre sous le diktat étranger, sous les injonctions des puissances néocoloniales.
A force d’imiter leur maître, elles persistent dans le ridicule et mobilisent contre elles les peuples désormais éveillés.
Dans ce contexte, les remèdes appliqués contribuent à aggraver le mal.
Mon pays, le Mali, est victime de cette attitude désastreuse qui touche désormais le Burkina et le Niger.
Les menaces actuelles d’agression collective contre le Niger sous les ordres à peine voilés de la France en sont la forme la plus lâche et dangereuse pour la communauté ouest-africaine.
Maintenant, le plus important est de se demander ce qui peut être fait pour changer l’ordre déstabilisateur et prédateur qui entretient cette situation défavorable aux intérêts des africains.