«La migration comme opportunité de développement et de cohésion sociale au Mali», était, ce jeudi 28 décembre 2023, la problématique au cœur de la célébration de la Journée de l’Association malienne des expulsés (AME) à la Maison de la presse. Initiée par le bureau de l’AME, en collaboration avec ses partenaires, ces journées ont enregistré la participation militante et combative d’environ deux cent travailleurs migrants expulsés et refoulés, des organisations de la société civiles et des partenaires européens.
L’Association Malienne des Expulsés (AME), selon ses responsables, a été créée en 1996 en réponse à des expulsions massives de migrants maliens en provenance de pays d’Afrique, d’Europe, d’Asie et d’Amérique. Sa mission est d’aider les migrants de retour (forcé ou volontaire) au Mali en leur offrant des services d’accueil, de soutien psychosocial, d’orientation, de sensibilisation et de défense de leurs droits.
Dans le cadre de ses activités de sensibilisation, l’AME organise chaque année une journée porte-ouverte pour les migrants et leurs familles, afin de leur donner la parole et de faire entendre leur voix. C’est également l’occasion pour les migrants de partager leurs expériences avec d’autres acteurs de la migration, qu’ils soient étatiques ou non, d’informer et de sensibiliser la population sur les enjeux de la migration.
A travers cette journée, il s’agissait pour l’AME de contribuer à la sensibilisation de la population et des autorités sur les enjeux de la migration au Mali ; de promouvoir la réinsertion et la cohésion sociales des migrants de retour à travers des messages de paix et de solidarité ; d’accroître la visibilité de l’Association Malienne des Expulsés (AME) et promouvoir ses actions et services et en faveur des migrants de retour.
Dans son mot de bienvenue, Ousmane DIARRA, président de l’AME; a rappelé que son organisation a été créée en 1996 par des migrants de retour. Il ressort de son propos que la première édition de l’AME s’est tenue en 2007.
Cette journée a été marquée par des panels sur : «Réintégration socio-économique des migrants de retour : défis et initiatives à prendre en compte, exemples de réussite et de bonnes pratiques» ; «Lutte contre les stéréotypes et la discrimination envers les migrants de retour : sensibilisation et promotion de la diversité » ; «L’importance de la coopération internationale dans la gestion des flux migratoires».
Dans son intervention, le représentant de la Délégation générale des Maliens établis à l’extérieur (DGME), a souligné qu’en la matière, l’Etat dispose d’une politique ambitieuse (PONAM) basée sur 8 axes.
Cette politique, a déploré Oumar BAH, fait face à des difficultés de financement en raison du fait que cela repose sur les partenaires extérieurs.
De son côté, Mamadou Lamine BANE du HCME a axé son intervention sur la Lutte contre les stéréotypes et la discrimination envers les migrants de retour.
Après un aperçu du cadre normatif, M. BANE a souligné que les 3/4 de la population mondiale sont concernées par cette question de migration.
D’entrée de jeu, il a affirmé que les migrants sont des humains comme nous, des personnes à part entière. De ce fait, dit-il, qui parle de droit de migrants parle de droits de l’homme.
Selon lui, la contribution positive qu’apportent les migrants constitue une croissance inclusive au développement durable, contribuant du coup à l’atteinte des ODD.
Il ressort de son propos, qu’il n’est nécessaire d’apprendre à nos populations ce qu’apportent les Maliens établis à l’extérieur, en termes de transfert financier, en termes de réalisation des infrastructures socio-sanitaires.
A en croire Mamadou Lamine BANE du HCME, les ODD ainsi que la nouvelle Constitution que vient d’adopter notre pays reconnaissent aux migrants le droit de revenir dans leur pays.
«Quand quelqu’un est dans l’exercice de ses droits fondamentaux, c’est-à-dire les droits de l’homme, le droit de partir et revenir, le droit de participer au développement local, ne doit pas est stigmatiser», a-t-il conseillé.
Pour réussir l’intégration des migrants de retour, il faut, selon M. BANE, répondre à des besoins particuliers au niveau individuel et communautaire.
Depuis 1991, les autorités maliennes travaillent pour, de son avis, faire la promotion des Maliens établis à l’extérieur à travers le ministère de Maliens établis à l’extérieur et services centraux et rattachés.
Depuis la construction de la Maison d’accueil des Maliens à l’extérieur, plus de 50 000 personnes ont été accueillies.
Seulement en 2023, plus de 50 275 personnes ont été accueillies par les autorités maliennes.
Il a déploré le fait que notre société stigmatise les migrants qui reviennent dans certaines conditions à travers des termes comme ‘’Tougan Madia’’.
«Nous devons leur dire qu’ils n’ont pas échoué, qu’ils ont appris une leçon malgré ce retour dans des conditions pénible», a préconisé le représentant du HCME qui estime qu’on peut toujours positiver l’échec.
D’ailleurs, il s’est réjoui de constater que beaucoup de migrants de retour sont devenu des chefs d’entreprise qui emploie des milliers de personnes.
Pour sa part, le représentant du GRAM, Pierre YOSSA, a abordé l’importance de la coopération internationale dans la gestion des flux migratoires.
Il a fait savoir que la mise en application du programme de La Haye en 2004 (l’externalisation des contrôles aux frontières) a aussi renforcé la répression contre les migrants en Europe.
«Ce programme transforme les pays de transit en gendarmes de l’Europe : c’est une véritable guerre aux migrants qui a lieu. Les soldats sont les États africains et l’agence des frontières,
FRONTEX, le bras armé européen», a-t-il critiqué.
Pour lui, les victimes premières de cette guerre sont les « voyageurs sans visas » qui vivent les pires souffrances en tentant de joindre les frontières européennes, qui vivent également les pires humiliations par les autorités des pays africains traversés, complices des pays Européens, lorsqu’ils sont refoulés vers le Mali.
A noter que les participants à cette journée ont eu droit une Présentation PPT sur les acquis et les perspectives de l’AME ; la projection de film sur la migration ; des prestations artistiques comme les slams, la musique.
Par Abdoulaye OUATTARA